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Le couteau japonais, une tradition ancestrale

Le couteau japonais, une tradition ancestrale

Christine Robalo | 29/01/2024 16:29

Voyage à travers le riche héritage et la finesse inégalée des couteaux japonais, symboles d'une tradition historique et moteurs de créativité dans l'univers de la gastronomie mondiale

Dans le monde effervescent de la gastronomie, un secret bien gardé lie les chefs du monde entier : leur passion inébranlable pour les couteaux. Au-delà d'être de simples outils de travail, ces instruments de précision se trouvent au cœur même de l'art culinaire. Les conversations en brigade s'animent autour de leurs lames, et c'est avec une attention particulière que chaque chef choisit son arsenal, conscient de l'impact direct de ces outils sur la qualité de leurs réalisations.

Les couteaux ne sont pas seulement des accessoires de cuisine, ils sont des extensions de la créativité des chefs, des compagnons de route indispensables. C'est pourquoi, à l'image des candidats de ces Hunger Games télévisés passant à heure de grande écoute sur les chaines hertziennes, de nombreux chefs ne se déplacent jamais sans leur propre set de couteaux. Des pièces soigneusement sélectionnées qui reflètent leur style et leur expertise.

Le chic des lames nipponnes

Dans le vaste univers des couteaux, les lames japonaises brillent d'un éclat particulier. Réputés pour leur finesse, leur équilibre et un tranchant qui pourrait faire rougir un rasoir, ces petits bijoux de l'artisanat marient avec brio tradition ancestrale et innovation. Grâce à leur histoire fascinante et à une fabrication aussi méticuleuse qu'une horloge suisse, les couteaux japonais se hissent au sommet de la pyramide des instruments de découpe.

Comme une scène d'un film d’Akira Kurosawa, l'histoire des couteaux japonais débute sur un champ de bataille animé, où des samouraïs, armés de leurs katanas et wakizashis, font virevolter leurs lames longues et courbées, découpant l'air et le chaos avec une élégance digne d'une danse chorégraphiée. Mais fast forward jusqu'à la révolution de Meiji en 1868, qui a relégué tous ces nobles guerriers en jupe-culotte bouffante aux oubliettes. Le katana et autres « coupe-coupe », interdits, ont laissé la place à un nouveau protagoniste : le couteau de cuisine. Les maîtres couteliers japonais, souvent appelés "Togishi", véritables maîtres de l'acier, se reconvertissent alors en créateurs de couteaux domestiques, vendus sans restriction et adaptés aux besoins locaux comme l'agriculture, la chasse, ou la pêche. Et voilà comment un art martial se transforme en art culinaire !

Ce n'est que vers la fin des années 1990 que ces lames d'exception ont conquis la France.  Au début, ils n’étaient essentiellement que des souvenirs exotiques rapportés par des chefs français après leurs voyages au Japon. Ces premiers couteaux importés, principalement des couteaux de chefs et des santokus, ne correspondaient pas vraiment aux besoins culinaires français ni aux normes locales. Mais peu à peu, des marques comme Global et Misono ont commencé à "occidentaliser" ces couteaux, en équipant leurs lames de qualité en inox et en les adaptant aux habitudes de découpe françaises. Et c'est ainsi que le couteau japonais a commencé à se faire un nom dans les cuisines toquées de France, et très vite, se rendre indispensables.

Les différentes formes de couteaux japonais 

Dans les ateliers japonais, les maîtres couteliers sont un peu les alchimistes de l'acier, métamorphosant des blocs durs en lames d'une finesse qui pourrait couper l'air lui-même. L'acier Damas, légendaire et mystérieux, est transformé en lame affutée. Les couteaux japonais, c'est la haute couture du monde de la découpe. Avec des lames plus effilées que celles de leurs homologues occidentaux, ils promettent des découpes d'une précision remarquable, qui feraient passer une chirurgie à cœur ouvert pour un travail grossier ! La forme de sabre de la lame, la célèbre "gyuto", n'est pas qu'un choix esthétique, mais un gage de maîtrise et de contrôle. Quant au manche, souvent en bois noble, il ne sert pas qu'à embellir l'objet : il équilibre parfaitement l'ensemble, faisant de ces couteaux un prolongement naturel et élégant de la main du chef.

  • En tête de liste, le Santoku, véritable célébrité des cuisines, brille par sa polyvalence. C'est le 'couteau-suisse' du chef, aussi à l'aise avec les légumes qu'avec les viandes ou les poissons. Un véritable héros du quotidien pour ceux qui n'ont d'yeux que pour un seul et unique compagnon de coupe. 
  • Le Nakiri, conçu spécialement pour les légumes et fruits avec sa lame rectangulaire distinctive, mesurant généralement entre 14 et 18 cm. Sa surface plate lui vaut le surnom de « couteau pelle », et sa lame ambidextre en V le rend accessible à un large public. Un vrai démocrate dans le monde de la découpe !
  • Le Gyuto, lui, est le couteau à tout faire, le James Bond de la cuisine. Sa lame longue et étroite et tranchante, souvent privilégiée par les professionnels pour la découpe de viandes, mais tout aussi efficace pour d'autres tâches culinaires.
  •  Et puis il y a le Deba, c'est le couteau traditionnel par excellence, robuste et fiable, conçu pour les tâches ardues comme lever un filet de poisson ou défier des arêtes rebelles. Un poids lourd qui assure la sécurité et la précision dans vos découpes.

Trois marques de couteaux japonais aperçues dans les cuisines de chefs 

Kai

Un nom qui résonne depuis plus de 100 ans dans l'univers des couteaux, est la quintessence de l'alliance entre innovation technique et l'héritage ancestral des samouraïs. Née dans la ville de Seki, reconnue comme le cœur battant de la coutellerie nippone, Kai, avec sa marque Shun, brille par son utilisation de l'acier VG-MAX, un vrai dur à cuire en matière de résistance et de tranchant. Leur série Shun Damas, un véritable trésor, séduit les chefs cuisiniers du monde entier grâce à son équilibre parfait et sa lame d'une solidité hors du commun. Composée de 32 couches d'acier Damas, avec un cœur en acier Vg-10 défiant la corrosion, d’un manche élaboré en lamelles de Pacca, chaque couteau est une pièce d'exception, façonnée à la main, une ode à la nature et au savoir-faire humain. Mais la qualité a un prix, et Kai, bien que sublime, peut peser sur le porte-monnaie.

Shan Zu

Le challenger du monde des couteaux japonais, fait une entrée remarquée dans la cour des grands. Son modèle Santoku, né de l'ingéniosité japonaise et conçu en acier inoxydable enrichi en chrome, défit corrosion, rayures et les ingrédients les plus récalcitrants. Léger et agile comme une plume, ce couteau est un rêve pour tout chef désireux d'allier maniabilité et efficacité. Sa lame de 2 mm d'épaisseur n'est pas qu'un atout de précision ; elle est aussi rapide que l'éclair, pour des découpes aussi nettes que précises. Et pour ne rien gâcher, sa surface sablée n'est pas seulement jolie à regarder : elle est antibactérienne, ce qui rend son nettoyage aussi facile qu'un jeu d'enfant. Mais attention, ce bijou demande de l'attention : un affûtage régulier pour garder son tranchant parfait. Et gare à sa délicatesse, car sa finesse peut aussi être sa faiblesse.

Global Sai

Global Sai s'affirme comme une référence majeure dans l'univers des couteaux, régulièrement salué comme un des meilleurs sur le marché. Chaque modèle est une signature du design, un chef-d'œuvre du renommé Komin Yamada, qui attire le regard dès le premier instant. Issus des ateliers expérimentés de Yoshikin, célèbre pour ses débuts en tant que fabricant de couverts en acier, les couteaux se présentent en monoblocs parfaits, sans aucune soudure. Leur conception est pensée pour traverser le temps, avec des lames qui défient la rouille, les taches et la corrosion, tout en offrant une facilité d'aiguisage grâce à leur alliage riche en carbone. La poignée creuse, caractéristique de chaque pièce, garantit une prise en main à la fois confortable et sécurisée, adaptée autant aux chefs professionnels qu'aux passionnés de cuisine.

Mais les couteliers français, ces fiers artisans du terroir, ont décidé de ne pas se laisser distancer par le tsunami des couteaux japonais ! Voilà nos Gaulois, d'ordinaire si attachés à leurs traditions, qui flirtent maintenant avec le Santoku et autres icônes nippones. Les ateliers de Thiers ou de Biesles, résonnent désormais des chocs des marteaux et des crépitements des forges, pour donner naissance à cette nouvelle génération de couteaux. Nogent, TB, Deglon et d'autres encore, se sont lancés dans la danse, prêts à épicer le marché avec un zeste de chic français.

Quatre questions à Matthieu Dupuis Baumal

Matthieu Dupuis Baumal, le chef étoilé qui orchestre les fourneaux du Château de la Gaude à Aix-en-Provence, jongle avec les saveurs comme un vrai maestro. À la tête de quatre restaurants, dont chacun brille de son propre éclat culinaire, cet ancien rugbyman fusionne avec brio la finesse de la cuisine française et les nuances de la cuisine japonaise. Ses influences, il les doit à ses mentors, d'Eiichi Edakuni à Kyoto à Bernard Bach et Michel Troisgros, qui lui ont appris à jongler avec les goûts et à innover sans cesse. En direct du Pays du Soleil Levant, où il se rend très souvent pour sentir les nouvelles tendances en matière de gastronomie nipponne, le chef répond à nos questions.

Qu'est-ce qui vous a initialement attiré vers les couteaux japonais, et comment ont-ils changé votre manière de cuisiner ?

Ma fascination pour les couteaux japonais est née lors de mes nombreux séjours au Japon. Étant gaucher, j’ai eu l’opportunité unique de me faire fabriquer un couteau sur mesure. La plupart des couteaux japonais sont conçus pour les droitiers, donc avoir un couteau adapté à ma main change complètement ma façon de cuisiner. Notamment, je possède une lame de 70 cm spécialement conçue pour lever le thon. Mon admiration pour le savoir-faire ancestral japonais, qui trouve ses racines chez les samouraïs, ne cesse de croître. Le respect de la lame, son tranchant et l'entretien spécifique à chaque type de couteau m'ont profondément marqué.

Pourriez-vous partager une expérience particulière où la qualité d'un couteau japonais a fait une différence significative dans la préparation d'un plat ?

Absolument. Lorsqu’on manipule un couteau japonais, surtout après s'y être habitué, la maîtrise et la dextérité atteignent un niveau supérieur. Dans mon restaurant gastronomique japonais (le Kaiseki au Château de la Gaude), où nous préparons beaucoup de sashimi et autres poissons crus, le tranchant exceptionnel des couteaux japonais est essentiel. Ils coupent avec une précision chirurgicale et leur manche et la prise en main offrent une aisance et une fluidité de geste inégalées.

Comment entretenez-vous vos couteaux japonais pour maintenir leur tranchant et leur qualité ?

L’affûtage est primordial. Mes couteaux, et ceux de toute mon équipe, sont affûtés très régulièrement, généralement une fois par semaine. Nous utilisons deux types de pierres à aiguiser avec différents grains. Pour ceux qui ont une lame en acier, je termine l’entretien en polissant la lame avec une petite gomme pour maintenir une finition parfaite. 

Parmi les différents styles de couteaux japonais, avez-vous une préférence ? Pourquoi ?

Mes favoris sont indéniablement les Deba. Les miens ont été conçus sur mesure pour le gaucher que je suis. Leur lame est idéalement adaptée pour lever le poisson. Pour moi, le Deba est plus qu'un couteau, c'est un véritable coup de cœur.

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