Et si l’avenir des caves à vin se faisait en mer ?
À bord d’un cargo-voilier pendant deux mois, des fûts de la Maison Bichot sont étudiés afin de déterminer l’impact de la mer sur le vieillissement du vin.
Une vague d’innovation submerge la Maison Bichot. La maison de vins de Bourgogne expérimente le vieillissement du vin en mer. Deux futs de 228 litres ont été chargés à bord du cargo-voilier Grain de Sail II pour un voyage au départ de Saint-Malo avec escales à New-York et à Pointe-à-Pitre.
L’objectif : « Rendre hommage au transport comme au XIXe siècle, pour voir un vieillissement dynamique, en pleine mer et étudier l’impact marin sur le cépage », détaille Lucas Przybyla, responsable marketing. Le départ a eu lieu le 18 janvier 2025 et l’arrivée est prévue aux alentours du 20 mars 2025. Mais fin janvier, les mauvaises conditions climatiques ont contraint le voilier à faire une pause aux Canaries.
Du Chardonnay, produit du merroir
À l’intérieur de ces futs, du Bourgogne Côte-d'Or Chardonnay « Secret de Famille » de 2024, « Une cuvée très importante pour nous », précise le responsable. Ces bouteilles n’ont pas été choisies par hasard. Lucas Przybyla clarifie : « Pour rester dans l’univers maritime, le Chardonnay est parfait. C’est un vin plaisant avec les fruits de mer, des huîtres ou du poisson par exemple. »
Effectuer cette expérimentation est aussi l’occasion d’un test avec un cépage fragile, plus que le Pinot noir par exemple. « On voulait prendre des risques en se disant qu’il y avait sûrement plus d’intérêt à faire de l’élevage en mer de ce cépage plutôt qu’avec un autre. »
D’autres entreprises se sont déjà penchées sur le vieillissement des vins en fond marin, « Et d’autres le font dans les cales des bateaux, comme la cuvée “Retour des îles” du château Le Puy », précise Lucas Przybyla. Mais Maison Bichot a installé ses futs sur le pont du bateau. Agitation de l’océan, air salin et variation de températures pourront ainsi impacter directement le vin.
Afin d’étudier ces conséquences, des bondes électroniques de la marque française Onatis ont été installées dans les futs. Plus que des simples bouchons, elles sont équipées de sept capteurs qui indiquent en temps réel la température extérieure et celle de l’intérieur du fut. Un premier constat a ainsi été établi : les températures nocturnes sur le pont du voilier sont extrêmement basses. « Et il fera très chaud en journée, lorsque le bateau sera aux Antilles, dans deux semaines environ. »
De l’écologie et de la différence
En mars 2024 déjà, une livraison de bouteilles de vins de la maison avait été effectuée à New-York, depuis Saint-Malo. Mais avec un voyage de deux semaines, aucune différence gustative n’avait été constatée. « L’idée, c’était surtout d’avoir un transport plus propre et responsable. » Selon le responsable marketing, remplacer le porte-conteneur par un cargo-voilier permet de réduire « 95 % de [leurs] émissions de CO2. » La maison de vins de Bourgogne espère ainsi continuer de travailler avec le marché américain tout en réduisant son impact environnemental. Reste encore à surveiller les annonces de la nouvelle administration de Donald Trump concernant la taxation des exportations française et surtout, de goûter le vin lors de son retour après deux mois en mer. Sentira-t-il le large ? « Nous espérons déjà qu’il sera buvable », sourit Lucas Przybyla.
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