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Ces chefs qui font aussi du pain (et que l'on peut manger chez soi !)

Ces chefs qui font aussi du pain (et que l'on peut manger chez soi !)

Bérangère Chanel | 21/10/2024 15:10

Le pain devient un plaisir gastronomique accessible grâce aux fabrications maison que de grandes toques ne servent plus seulement à leurs tables.

Taux d’hydratation, pétrissage, taux de gluten ou encore levain maison… L’exercice boulanger répond non seulement à un tour de main précis mais aussi un enseignement rigoureux que maîtrisent de plus en plus de grands chefs. Nombre d’entre eux redécouvrent un savoir-faire ancestral en préservant les valeurs patrimoniales et gastronomique de variétés de blés anciens, à l’image d’Eric Frechon qui ouvre dès 2018 au sous-sol du Bristol à Paris son propre fournil. Un travail d’orfèvre qui fait suite à sa rencontre avec le célèbre artisan meunier Roland Feuillas, exerçant à Cucugnan.

À Saint-Bonnet-le-Froid, Régis Marcon est un précurseur du genre. En 2004, il fait revivre le cœur du village en ouvrant une boulangerie qui n’existait plus. Symbole du commerce de quartier indispensable, celle-ci est ainsi redevenue ce délicieux passage pour lequel on se plaît à faire un détour afin d’attraper une mie bien faite. À la Chanterelle des Marcon, la sélection varie selon les saisons : tradition, seigle, céréales, campagne, pain aux fruits, nordique, petit épeautre, paysan, complet, pain à la châtaigne, pain figue châtaigne, pain sans gluten, pain aux noix, pain au sarrasin.

Fièrement proposés dans la corbeille délicieusement garnie de nombreuses tables gastronomiques, les pains maisons des grands chefs sont désormais au cœur de l’expérience-client, celle qui dépasse le temps restreint passé à table. À Baumanière par exemple, où Glenn Viel accorde ses plats avec différents types de mie, des cours de boulangerie délivrent les secrets de recettes du levain, de la foccacia et même des pains à burger ou hot-dogs. Comptez 150 euros les quatre heures de cours donné par Gauthier.

Mais, si vous ne souhaitez pas mettre la main à la pâte, de plus en plus de grandes toques ont annexé leur table d’une épicerie ou d’un point de vente où acheter le même pain que celui servi dans le cadre d’un repas gastronomique.

La dernière initiative a eu lieu à Saint-Emilion. En association avec l’entreprise familiale Banton-Lauret, le château de Troplong-Mondot vient d’ouvrir une boulangerie à l’entrée du village, dont le nom rappelle celui du restaurant du domaine bordelais : La Petite Perdrix (le restaurant s’appelle les Belles Perdrix, ndlr). Et voici d’autres échantillons dans cette sélection.

Le Garde-Manger, Emmanuel Renaut à Megève 

« Nous confectionnons notre pain pour le restaurant depuis toujours » lance Emmanuel Renaut. Et de raconter « je n’ai jamais apprécié les corbeilles qui réunissent une pléiade de variétés boulangères, comme une brioche feuilletée, une foccacia etc. J’ai toujours trouvé qu’elles ne s’associaient pas à ma cuisine. Qui plus est, ce sont bien souvent des plats à part entière tant ils sont roboratifs et que l’on a envie de les dévorer avant même de démarrer le repas ». Accompagné de deux boulangers pour gérer la production, Emmanuel Renaut puise son savoir-faire dans sa rencontre avec Alex Croquet il y a trente ans. « C’est un boulanger originaire du nord de la France qui m’a beaucoup aidé dans la façon de travailler et de respecter l’ensemble de la préparation du pain » révèle Emmanuel Renaut.

Dans la cuisine du Flocons de sel, le chef aux cinq toques utilise des farines locales comme celle du Trièves, près de Grenoble. « Je préfère un blé local plutôt que de faire venir du sud de la France une variété ancienne » confie-t-il. Seigle, malt, grand épeautre… Le chef Renaut dispose de ses propres mélanges pour composer un pain au levain et un autre dans lequel il ajoute un soupçon de levure (un gramme pour un kilo précisément). « Dans le même esprit qu’un assaisonnement, j’utilise diverses variétés ajoutées à une farine de base afin d’obtenir un pain de caractère ».

Mais c’est uniquement le pain au levain que l’on retrouve dans son Garde-Manger, l’épicerie fine qu’il a ouvert à l’été 2022 dans le centre-ville de Megève. « Avec les saucissons et nos plats préparés, les clients nous réclamaient un peu de pain. Il y avait ainsi une logique à ajouter une offre boulangère » nous précise Emmanuel Renaut.


© Emmanuel Renaut

Le Petit Couillon, Alexandre Couillon à Noirmoutier 

Tout a commencé en 2021 avec une épicerie fine, garnie de fleur de sel et d’indispensables produits locaux cultivés en Vendée et en Pays de la Loire. Mais quoi de plus évident qu’un bon morceau de pain pour étaler les rillettes de maquereaux ou du beurre aux algues ? Depuis l’année dernière, Alexandre Couillon complète son offre de quartier avec une production boulangère maison réalisée quotidiennement. Le chef aux cinq toques réalise un pain au levain à partir d’une farine de blé ancien. C’est une productrice, Anne-Laure Jolivet, qui s’occupe de cultiver cette variété exclusivement pour la maison Couillon. De la farine, du sel, de l’eau, et c’est tout ! Alexandre Couillon a ambitionné de revenir aux origines de la saveur première du pain en consultant feu l’artisan Thierry Delabre. Le pain au levain aussi bien servi à la table gastronomique qu’au bistrot ou à l’hôtel lors du petit-déjeuner.


© DR

Levain, Olivier Nasti à Kaysersberg 

Kouglof, baeckeoffe, Schneckekueche… L’Alsace a la tradition du temps long quand vient le moment de cuisiner ou de pâtisser. Chérir donc cette patience est donc tout naturel pour le chef Olivier Nasti qui a ouvert une boulangerie à l’été 2022. La promesse est dans le nom : levain. Depuis sa rencontre avec un boulanger de Digne-les-Bains, surnommé Lulu qui utilise une farine obtenue à la meule et pétrit tous ses pains à la main, le grand chef du Chambard a à cœur de fabriquer des recettes boulangères dont l’un des ingrédients clés n’est autre que le temps. À son tour, Olivier Nasti a eu envie de proposer la saveur de l’authenticité à la clientèle locale. Campagne, seigle, sarrasin, dansk ou céréales, petit épeautre… Toute une gamme de miches est pétrie pour rassasier toutes les préférences, à acheter au kilo.


© ILYAFOODSTORIES

Mitron Bakery, Mauro Colagreco à Nice 

Au Mirazur, le voyage gastronomique commence toujours de cette façon : une corbeille de pain vous invite à rompre une mie légèrement tiède, nichée dans une délicate serviette. Perché sur son rocher de Menton, Mauro Colagreco a érigé le pain en symbole de partage et de générosité. Mais pas n’importe quelle miche. Il y a une évidence quand on est ambassadeur de bonne volonté pour la biodiversité auprès de l’Unesco à confectionner ce pain avec des farines qui ne font mal ni à la planète ni aux Hommes. Pour sa boulangerie artisanale Mitron Bakery, qui dispose d’adresses à Menton, Monaco et sur le marché du cours Saleya à Nice, Mauro Colagreco ne propose des pains qu’à partir de farines issues d’une agriculture régénératrice et biologique, à base de blés anciens n’ayant jamais subi aucune modification génétique : Barbu du Roussillon, Méteil, blé de Khorasan, Rouge de Bordeaux, Pétanielle Noire de Nice… À savourer à la sortie du four, ou en sandwiches.

C’est à la suite d’une rencontre avec le légendaire producteur de farines de Cucugnan, Roland Feuillas, que le chef aux quatre toques décide de redonner toute sa place à un aliment de base selon un savoir-faire ancestral. À Menton, non seulement Mitron Bakery dispose de son propre fournil, mais les boules sont cuites dans un four datant de 1906, judicieusement caché dans les ruelles de la cité azuréenne.


© COLINES CS

B.O.U.L.O.M, Julien Duboué à Paris

On l’a connu dans Top Chef. On a dévoré son hommage à ses racines landaises au restaurant A Noste lancé en 2014. Et puis, on a craqué pour son concept de « boulangerie où l’on mange » à son ouverture en avril 2018. Tout a été dit à propos de ce buffet à volonté où l’on plonge les cuillères dans de généreux plats qui ont mijoté toute la nuit. Mais, il serait réducteur de se concentrer uniquement sur cette offre. Car B.O.U.L.O.M, c’est aussi une boulangerie que Julien Duboué utilise pour défendre les valeurs des traditions anciennes, celles nourries aux blés anciens. Commerce de quartier, son concept fournit baguettes, pains boules et autres pains de campagne, les mêmes que ceux choisis pour accompagner son assiette près du buffet.

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