La Villa Camille, le renouveau d'une maison de famille

Les habitants de Banyuls ont une vraie tendresse pour cette villa noyée sous les palmiers qui fait depuis toujours partie de leur paysage. Bâtie en 1888 par un architecte danois pour l’industriel Pierre Bardou (qui créa les fameux papiers à cigarette JOB), cette demeure Belle Époque est restée dans la famille durant plusieurs générations avant d’être transformée en résidence de vacances, perdant alors beaucoup de ses charmes. Elle a, par bonheur, été rachetée en 2022 par le groupe Assas Hotels, qui a décidé de lui redonner toute sa noblesse, l’inscrivant à nouveau dans le riche patrimoine immobilier de la ville.

L’architecte local Philippe Pous et l’architecte d’intérieur Leslie Gauthier ont précieusement conservé ce qui pouvait l’être encore: le toit historique en tuiles noires (le seul de Banyuls), qui permet de reconnaître la villa depuis la mer ; la typographie d’origine de la Villa Camille, qui s’affiche à nouveau à l’entrée de la villa, retravaillée en ferronnerie ; ou encore l’ancien préau, qui a repris ses dimensions d’origine et abrite désormais la piscine. À l’intérieur, les espaces ont retrouvé leur majesté, à l’image des 42 chambres et suites dont les plafonds modernes ont été déposés pour retrouver l’amplitude des volumes et la délicatesse des moulures historiques. Les murs sont tendus de toiles de Jouy, chahutées par des tissus rayés rouge et blanc qui habillent certains tours de lit, inspirés des toiles de transats alignés sur la plage toute proche. Véritable morceau d’histoire, la salle à manger arbore à nouveau ses plafonds à caissons, ses carreaux de ciment et son imposante cheminée, le tout bousculé là encore par des éléments contemporains qui donnent à l’espace tout son style, comme ces très poétiques lustres aux allures de nuage.

Les hôtes retrouvent ici les locaux, qui font à nouveau de la villa l’un de leurs QG. Dès le début de la soirée, les fidèles (de plus en plus nombreux) rejoignent le bar pour un premier verre et quelques tapas avant de déguster l’une des meilleures cuisines catalanes de Banyuls, servie également dans le jardin qui ouvre sur le port et son ballet des bateaux de pêche revenant à quai dans la lumière du crépuscule. À deux pas, l’ancien préau avec sa piscine voisine, le spa griffé Nuxe où l’on vient pour une séance au sauna ou dans la grotte de glace avant de choisir un soin ou un massage. Parfaitement revitalisé, il ne reste plus qu’à rejoindre le solarium posé sur le toit pour s’installer dans un transat en admirant la vue à 180° sur la ville avec ses ruelles pavées et sa promenade qui borde le port et la Méditerranée.

Trois questions à Leslie Gauthier, architecte d'intérieur

La Villa Camille est le symbole de l’architecture Belle Époque qui fit les grandes heures de la côte. Dans quel état était-elle quand vous avez entamé la restauration ?

Leslie Gauthier  : Il ne restait hélas plus grand -chose du bâtiment historique, largement altéré au fil des transformations. Dans les étages, les codes Belle Époque avaient tous disparu et nous avons fait un vrai travail d’archéologie pour les réintégrer. Nous avons enlevé les faux plafonds et restauré les moulures et corniches historiques. Le rez-de-chaussée avait heureusement conservé certains éléments, notamment les très beaux carreaux de ciment sur quelque 200 m 2 ou encore l’ancien plafond à caissons que nous avons restauré. Autre clin d’œil à l’histoire, nous avons encadré et réparti dans les chambres de très beaux dessins de la villa, réalisés par l’architecte Viggo Dorph-Petersen

Comment avez-vous pensé l’architecture intérieure ?

L.G. : Nous avons conservé l’esprit de la maison tel qu’il avait été pensé par Viggo Dorph-Petersen, mais nous avons voulu éviter une restauration trop littérale. Dans les chambres, la toile de Jouy traditionnelle se mêle à un parquet en chêne clair plus contemporain et un mobilier aux lignes épurées. Dans la grande salle à manger, nous avons réchauffé et modernisé l’espace avec des boiseries, un immense oranger qui apporte une touche végétale et un néon qui reprend la devise de la ville, «In mare via tua» («Ta voie est sur la mer»).

La restauration de la Villa vient de prendre fin. Comment définiriez-vous le lieu désormais ?

L.G : La villa porte en elle son histoire, mais rien d’intimidant ici. L’hôtel est un lieu joyeux et bien vivant. Nous avons réuni le lobby et le bar pour que les hôtes se sentent d’emblée accueillis comme dans une maison de famille. La Villa Camille est à nouveau un lieu de rendez-vous pour les gens de Banyuls, qui viennent boire un verre ou prendre un repas. Et pour les voyageurs, il est sans conteste le plus bel hôtel de la côte.