Hugo SOUCHET

« Je suis venu ici pour dire non ! ». Hugo Souchet avait 29 ans quand il a débarqué à Eugénie-les-Bains. « C’était Alain Ducasse qui m’avait envoyé là-bas, je n’y avais jamais mangé, je ne connaissais pas Michel Guérard, mais j’étais jeune et citadin, je me faisais l’idée d’une maison peut-être un peu endormie dans sa campagne… Et puis j’ai passé trois jours avec Monsieur et Madame, et toute ma vision a changé. Cela fait maintenant huit ans. » 

C’est ainsi qu’Hugo Souchet est devenu le chef des cuisines de cet endroit mythique, les Prés d’Eugénie, le restaurant de Michel Guérard, en succédant à Olivier Brûlard, en 2017. Après avoir connu de grands chefs et des établissements de prestige, le Meurice avec Yannick Alleno, Pierre Gagnaire, les Crayères avec Philippe Mille, Daniel Boulud à New York, un an au Japon et quatre ans au Louis XV, le natif de Versailles a trouvé son bonheur, son présent et son avenir dans ce Brigadoon enchanteur du cœur des Landes.  

Une cuisine de terroir et de transmission 

« Pendant deux ans, j’ai appris à faire du Guérard à ses côtés. On s’est focalisé sur 250 recettes environ, à faire et à refaire jusqu’à ce que ce soit parfait. Ensuite, j’ai pu commencer à proposer des choses… ». Celui qu’il appelle toujours Monsieur, et pas autrement, va devenir son maître, son mentor, son père et son grand-père, dans un lien forcément unique, comme le comprennent tous ceux qui ont approché Michel Guérard, cet être rare d’intelligence, de bienveillance et d’humanité.  

« Nous goûtions tous les plats ensemble, à cette table où nous sommes assis en ce moment, et puis chez lui, et puis chez moi. Surtout au moment du Covid, nous mangions tous les jours ensemble, parfois avec Andreu (Coma Roca, le directeur du restaurant), à goûter, à discuter, à faire évoluer la recette. Il m’a tout apporté, et pas seulement sur le plan de la cuisine. Il m’a fait lire, il m’a fait apprendre à me cultiver, il m’a fait beaucoup de bien, il savait enlever du stress, il savait réconforter… » 

Aujourd’hui encore, Eugénie reste une maison de famille, avec Eléonore et Adeline, les deux filles de Christine et Michel. « Nous avons gardé l’habitude de tout goûter ensemble, avec elles et Andreu, avec toujours la même pensée pour Monsieur, en se demandant s’il aurait approuvé et aimé tel ou tel plat. Pour tout le monde, être ici, hier comme aujourd’hui, c’est une fierté et toutes les équipes en ont conscience ».  

La cuisine d’Hugo Souchet est donc inévitablement marquée par la maison et par l’esprit Guérard, ce caractère unique de luxe paysan, celui de la vérité, de l’authenticité, du plaisir et du goût qui passent par le cœur et l’âme. Bien sûr, le cuisinier si talentueux sait aussi faire évoluer ses assiettes selon ses idées et des préférences mais, dans la magnifique salle de dîner où chaque soir, la magie opère, Michel et Christine y veillent affectueusement.  

La table où nous nous entretenons avec le chef se met tout à coup à trembler toute seule. « C’est Monsieur qui m’engueule ! » dit le chef dans un demi-sourire.